Troubles sociaux au Sénégal
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Le 3 juillet, à 20h (heure locale), le président du Sénégal, Macky Sall, a annoncé ne pas se représenter pour un troisième mandat à l’élection présidentielle de février 2024. Depuis un an, le président en exercice avait laissé en suspens l’annonce ou non de sa candidature, ce qui avait suscité de vives tensions politiques, incarnées par l’émergence de troubles sociaux d’ampleur, en particulier dans les plus grands centres urbains. La perspective de ce troisième mandat a suscité de nombreux débats, certains le considérant comme légal, contrairement à l’opposition politique qui le jugeait inconstitutionnel et qui y voyait une autre preuve de la dérive autoritaire du gouvernement, se traduisant principalement par la multiplication des arrestations arbitraires ou l’interdiction des manifestations.
Dans l’immédiat, les troubles sociaux sont susceptibles de s’atténuer, sans pour autant disparaitre. En effet, depuis le 1er juin, de violentes manifestations avaient éclaté dans le cadre du procès, en mars dernier, du leader d’opposition Ousmane Sonko, troisième homme de l’élection présidentielle en 2019. Après plusieurs mois de rebondissements judiciaires et de tensions politiques entourant le procès, le 1er juin, Ousmane Sonko a été acquitté des accusations de menaces de mort et de viols -pour lesquelles le procureur avait requis dix ans de prison- mais condamné à deux ans de prison ferme pour « corruption de la jeunesse ». Cette condamnation pourrait le priver de ses droits civiques et le rendre inéligible, à l’élection présidentielle.
A l’annonce du verdict du procès Sonko, des émeutes ont éclaté à travers l’ensemble du Sénégal et plus particulièrement à Dakar, Ziguinchor, Mbour, Kaolack et Saint-Louis ; au sein de la capitale, les affrontements se sont essentiellement concentrés au sein et/ou aux abords de Cité Keur Gorgui -où réside Ousmane Sonko-, Mermoz-Sacré-Coeur, le campus de l’Université Cheick Anta Diop (UCAD), l’avenue Cheick Anta Diop, Medina, la Cour Suprême, le Palais de Justice et le Palais présidentiel. Ces protestations et actes de vandalismes ont causé au moins 16 morts et plus de 500 arrestations. De nombreuses perturbations des services de communication avaient été observés, notamment une restriction d’accès aux réseaux sociaux (Twitter, Facebook) et à certaines applications de messagerie (WhatsApp). La Place de la Nation - également appelée « Place de l’Obélisque» - reste l’épicentre le plus probable de nouveaux troubles sociaux, cette dernière étant au cœur de la contestation sénégalaise depuis 2019. Cette place occupe par ailleurs une place centrale dans Dakar et s’avère à proximité immédiate - 500 mètres - de la route N1 qui connecte la capitale sénégalaise à l’aéroport international ; toute dispersion incontrôlée des manifestants risquera, de fait, d’avoir des répercussions logistiques potentiellement majeures. Depuis ces dernières semaines, une période d’accalmie relative s’est installée dans la capitale. Cependant, en cas de recrudescence des protestations, ces lieux sont à éviter.

Au cœur des contestations, l’avenir d’Ousmane Sonko est incertain. Depuis l’annonce du verdict, aucun nouvel élément n’a été apporté, et il reste, selon ses mots, « séquestré » chez lui par les forces de sécurité depuis le 28 mai. Ainsi, malgré le retrait du président Macky Sall de la course présidentielle de 2024, le discours du 3 juillet n’a pas répondu aux demandes de l’opposition concernant le harcèlement des partis adverses ou concernant la partialité judiciaire. Ces questions restent des facteurs de tension et de trouble avant les élections.
Les accusations font suite à plusieurs évènements survenus ces dernières années. Les condamnations de Karim Wade, fils de l’ancien président Abdoulaye Wade, et de Khalifa Sall, ancien maire de Dakar, respectivement en 2015 et 2019 constituent les premiers éléments. Karim Wade avait été condamné à six ans de prison ferme pour enrichissement illicite et Khalifa Sall à cinq ans de prison ferme pour détournement de fonds publics. Ces deux membres de l’opposition ont été graciés suite à leur condamnation mais continuent d’être inéligibles. Lors du dernier dialogue national (mai 2023), il a été établi que la peine d’inéligibilité devrait s’éteindre lorsque la peine est épuisée. Ces discussions pourraient peut-être permettre la réintégration de Karim Wade et de Khalifa Sall à la course présidentielle de 2024. Cependant, le destin d’Ousmane Sonko reste incertain.
Un deuxième élément accusant le gouvernement de harcèlement des partis adverses est la répression de mouvements de protestations à l’initiative de la coalition Yewwi Askan Wi ou YAW (« Libérer le peuple »). Une manifestation de soutien à Ousmane Sonko organisée par la coalition a été interdite, cependant la YAW a bravé l’interdiction du maire le 25 juin dernier et exécuté sa marche entre les cimetières Saint Lazare et la Cité Keur Gorgui, où se situe le domicile d’Ousmane Sonko. Les forces de l’ordre ont dispersé les manifestants, résultant en l’arrestation d’au moins cinq chefs de la coalition YAW.
Malgré une annonce du président permettant un retour au calme, de nombreux facteurs de tension demeurent. L’adversité entre l’opposition et le gouvernement subsiste, les élections de février 2024 constituant un facteur majeur de tension. Ainsi, la situation sécuritaire au Sénégal, qui a constitué un îlot de stabilité en Afrique de l’Ouest, demeure volatile.
Pour les managers, d’autres recommandations sont aussi de mise en prévision d’une possible dégradation de la situation sécuritaire :
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